octobre 6, 2025

L’accès inégal à l’éducation entre les filles et garçons dans les zones rurales du Niger

Au Niger, l’école reste un privilège inégalement partagé. Dans les zones rurales, l’écart entre filles et garçons demeure préoccupant malgré les efforts des autorités et des partenaires. Alors que l’éducation est reconnue comme un levier de développement, des milliers de filles voient encore leurs rêves d’école interrompus par des barrières sociales, économiques et culturelles.

Des chiffres qui révèlent un retard persistant

En 2022, selon l’UNESCO, Institute for Statistics (UIS), seuls 54 % des filles achèvent le cycle primaire contre 61 % des garçons.

En 2023, les données de l’UNICEF indiquent un taux brut de scolarisation primaire de 66 % pour les filles et 71 % pour les garçons, traduisant une légère amélioration par rapport à l’année précédente.

Toujours en 2023, l’UNICEF révèle que moins de 60 % des élèves qui terminent le primaire accèdent réellement au secondaire. Parmi eux, seulement 20 % achèvent le cycle complet du secondaire : environ 23,7 % pour les garçons contre 17 % pour les filles.

Ces chiffres montrent une persistance de l’écart de genre, particulièrement en milieu rural, où les obstacles à la scolarisation des filles restent nombreux.

Les obstacles multiples à la scolarisation des filles

Plusieurs facteurs expliquent cet écart persistant. Le mariage précoce reste l’un des freins majeurs : le Niger enregistre l’un des taux les plus élevés de mariages d’enfants dans le monde, ce qui pousse de nombreuses adolescentes à abandonner leurs études. La pauvreté accentue le problème, les familles rurales choisissant souvent de scolariser les garçons en priorité lorsqu’elles disposent de moyens limités. À cela s’ajoutent des normes sociales qui assignent aux filles un rôle domestique, perçu comme plus utile que l’école, et des infrastructures insuffisantes : écoles éloignées, manque de latrines séparées et pénurie d’enseignantes, autant de facteurs qui découragent la fréquentation scolaire des filles.

Les réponses publiques et associatives

Face à cette réalité, l’État nigérien, avec l’appui de ses partenaires, a élaboré plusieurs plans sectoriels de l’éducation pour promouvoir l’accès des filles à l’école. Des initiatives comme les cantines scolaires, les bourses d’étude ou encore la construction d’écoles de proximité cherchent à réduire les coûts directs et indirects de la scolarisation. Des ONG telles que Plan International, Save the Children ou le collectif Girls Not Brides mènent des campagnes contre le mariage d’enfants, soutiennent la réinsertion scolaire et sensibilisent les communautés. Les leaders religieux et traditionnels, de plus en plus impliqués, jouent un rôle crucial pour faire évoluer les mentalités, tandis que les radios communautaires et les médias locaux diffusent des messages encourageant la scolarisation des filles.

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L’inégalité d’accès à l’éducation ne se limite pas à une injustice individuelle, elle freine aussi le développement du pays. Des études montrent que les communautés où les filles sont éduquées bénéficient d’une meilleure productivité agricole, d’une réduction des mariages précoces et d’une amélioration des indicateurs de santé. À l’inverse, priver les filles d’école entretient la pauvreté, augmente la vulnérabilité face aux crises et réduit la participation citoyenne des femmes. À long terme, cette situation perpétue un cercle vicieux où les filles peu instruites deviennent des mères dont les enfants, à leur tour, risquent d’être exclus de l’école.

Recommandations

Pour réduire l’écart entre filles et garçons dans l’accès à l’éducation en milieu rural, plusieurs pistes peuvent être mises en œuvre :

-Renforcer les infrastructures scolaires en construisant davantage d’écoles de proximité et en dotant les établissements de latrines séparées adaptées aux filles.

-Alléger le poids économique des familles grâce à des bourses, des cantines scolaires ou des transferts conditionnels incitant à maintenir les filles à l’école.

-Lutter contre le mariage précoce à travers une application stricte des lois, mais aussi par des campagnes de sensibilisation auprès des communautés.

-Former et recruter davantage d’enseignantes, pour favoriser un environnement scolaire rassurant et inclusif pour les filles.

-Mobiliser les leaders communautaires et religieux afin de transformer les normes sociales qui freinent la scolarisation des filles.

𝗖𝗼𝗻𝗰𝗹𝘂𝘀𝗶𝗼𝗻

L’écart de genre dans l’éducation au Niger reste un défi majeur, particulièrement en zones rurales où la pauvreté, les normes sociales et le mariage précoce limitent les perspectives des filles. Les initiatives publiques et associatives montrent des résultats encourageants, mais les progrès restent fragiles. Garantir aux filles un accès équitable à l’école n’est pas seulement une question de justice, c’est une condition essentielle pour le développement économique, social et humain du pays.

Mariama OUSMANE

Cette publication WanaData a été soutenue par Code for Africa et la Digital Democracy Initiative dans le cadre du projet Digitalise Youth , financé par le Partenariat Européen pour la Démocratie (EPD)

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